Du 12 juillet au 14 septembre 2008
L’ Homme méditerranéen de Pierre Fournel
D’où vient que les tableaux de Pierre Fournel s’imposent doucement dans le silence pour vous habiter longuement ?
Peut-être parce que le peintre, graveur et sculpteur à la fois, a su tracer sa voie sûre avec l’obstination de ceux que le doute n’arrive pas à détourner. Peut-être aussi, que c’est la matière elle-même qui a fini par dicter le passage après un long tête-à-tête avec diverses techniques spécifiques. Aussi, sans doute, parce que P. Fournel est présent à lui-même et donc présent aux autres.
La visite de son atelier est édifiante :patiemment collectés, plus de trois cents qualités différentes de sables attendent d’être tamisés, agencés, associés, travaillés avant d’être captés et fixés par une résine. La toile apprêtée va recevoir plusieurs strates de sables de textures différentes, et le peintre, maître du temps, va patiemment provoquer des sédimentations, des fossilisations. Sans adjonction de couleurs. Car le sable est ici sujet, matière et couleur à la fois.
Alors, des paysages humains s’organisent. Le peintre, à coup sûr, est bon marcheur et surtout grand voyageur sur les chemins méditerranéens. Les chemins sauniers languedociens d’abord, ceux du Sahara, ceux d’Extrême Orient ensuite. Sortent de terre et du temps, les villes Saintes, les villes « ruches », les villes martyres …
Patiemment, Pierre Fournel a su élaborer un langage ; et sa fabrication est tout aussi importante que la production elle-même. Il arrive aussi au peintre d’inventer des territoires nouveaux. A la poursuite de son « Atlantide », il a imaginé un alphabet fabuleux. On sait que, en art, on parle aux autres dans un autre but que de communiquer des informations.
Le paysage, paraît-il pose problème depuis la Renaissance. Pierre Fournel lui, a trouvé l’issue : il chante les vertus du paysage méditerranéen et son tressage de cultures, ses grands mouvements de pensée, son sens de la civilisation et de la dignité. Chez Pierre Fournel, même s’il n’est pas représenté directement, l’homme est toujours central. En cela aussi, il rejoint les traditions du bassin méditerranéen en architecture surtout, qui concordent toujours à livrer une image de l’homme redressé. Il n’est pas surprenant alors de voir le peintre s’attaquer à une grande fresque épique sur les Droits de l’Homme.
Cette conception humaniste était déjà présente au XVI è siècle, chez Giordano Bruno l’hérétique qui avançait déjà la pluralité des mondes et l’infinité de l’univers :
« L’homme se trouve placé sur les limites du temps et de l’éternité, entre la raison et les sens. Il participe de ce double état, de l’une et de l’autre extrémité. Il se tient debout, en quelque sorte, à l’horizon de la Nature » (1).
René Trusses - Mai 2008